Journée funeste, après avoir dit au revoir à notre ami Pierre, je raccompagne mes camarades à la Gare des Guillemins… Diantre ! Déjà 12h30 ! Les estomacs crient famine ! On croque ? On craque ? On ne va pas chercher midi à quatorze heure, le Grand Café de la Gare est à une portée de quai, le temps de changer d’aiguillages et nous voilà installé dans ce buffet somme toute très moderne, un peu à l’image que Calatrava a insufflé aux Guillemins. Ce n’est pas ma première visite, je suis confiant sur la qualité des mets et du service. Nous sommes rapidement pris en main par une sympathique brigade qui court de table en table, prend et passe commande de l’autre côté de cet interminable comptoir qui sépare la salle des cuisines ouvertes.
Nous serons très local et très gaulois ce midi et presque tous sur la même longueur d’onde. Nous évoquons le goût de Pierre pour les abats et la cuisine rustique de terroir. Nous lui rendrons, par notre commande, un hommage bien mérité. Pour entamer ce moment magique, Quai 2, nous sommes en partance pour de délicieux Fondus au Fromage de Herve… mais dans la foulée, ne voilà-t-il pas qu’on nous appelle au Quai 9 ¾ ? Une voix nasillarde au possible débite un flot de paroles où nous croyons entendre que les passagers pour les Andouillettes charcutières A.A.A.A.A. à la moutarde à l’ancienne, accompagnées de frites maison, ainsi que ceux pour les Rognons de veau à la liégeoise avec pommes sautées vont être servis imminemment. Nous ne nous faisons pas prier, couverts en main, nous sommes fin prêts ! Ah mes amis ! Quel régal ! L’Andouillette est proche de la perfection !
Pour les curieuses neuzes, on pourrait penser que l’appellation 5A serait le top de l’andouillette, et qu’il existerait des 4A, voire encore des 3A… Que nenni ! Il faut savoir que l’andouillette ne bénéficie ni de l’AOC ni de l’IGP, elle n’a que la dénomination « 5A » pour se défendre. Ce pseudo « diplôme » non officiel est une garantie de qualité pour les professionnels du secteur et pour les consommateurs. L’Association Amicale des Amateurs d’Andouillettes Authentiques fut créée à la fin des années 1960. Elle signale avec le sigle « AAAAA » les andouillettes jugées de qualité gustative supérieure. On raconte que le nom de l’Association serait venu à ses fondateurs après que l’un d’eux, Henri Clos-Jouve, lyonnais et bon-vivant, ponctue d’un rire communicatif « Ah ! Ah ! Ah ! Ah ! Ah ! » l’un des diners où tous se délectaient d’andouillettes. A quoi ça tient parfois ! (Smiley !)
La cuisine liégeoise est une cuisine populaire, simple, sans sophistication. Parmi les grandes spécialités, on notera les rognons à la liégeoise. Les ingrédients en sus des rognons eux-mêmes, du pèket de Liège, des baies de genévrier, des oignons perlés, des lardons et des champignons. Après une dégustation de ce mets sympathique, vous pourrez vous laissez conter que les rognons de veau à la liégeoise sont emblématiques de l’héritage culinaire de la Cité Ardente et reflètent une culture qui valorise les produits locaux et les méthodes de cuisson traditionnelles. Et maintenant, répétez après moi : « Nom di Dju, c’est crevé bon ! D’ja bin magni, d’ji va rimni ! »
Du côté de la théorie des fluides, Pierre portera son choix sur un Gigondas, Domaine du Cayron, de 2020, un vin élaboré au départ de vieilles vignes d’au moins 40 ans d’âge, et vendangées à la main, afin de créer cet assemblage de Grenache, Syrah, Cinsault et Mourvèdre, qui titre tout de même à 14.5%. Il nous fut servi trop frais, mais la deuxième quille fut parfaite.