
L’ESPIÈGLERIE… ATTACHEZ VOS CAPES ET AFFÛTEZ VOS FOURCHETTES !
En ce jour radieux, je vous convie à Namur, fière capitale de la Wallonie, noble fille de Meuse et de Sambre, où jadis résonnaient les ateliers des Tanneurs. C’est dans ces antiques ateliers que se dresse aujourd’hui un établissement digne du Roi : L’Espièglerie, auberge gastronomique au nom aussi taquin que sa cuisine est raffinée.
Je connus cette table en l’an de grâce 1988, alors qu’elle n’était encore qu’une jeune lame dans son fourreau, point d’hôtel à l’époque ! L’auberge prit du galon en 1995 sous l’impulsion de la famille Bouvier, dynastie de bâtisseurs éclairés, qui restaura avec bravoure moultes demeures du XVIIᵉ dans le quartier. Ces valeureux artisans du goût s’illustrèrent aussi à Marche-les-Dames, en redonnant vie à l’Abbaye Notre-Dame du Vivier, où nous avons dernièrement ripailler dans « La Chapelle Bethléem » – rien de moins ! Mais revenons à nos festins…
Ce jour-là, le Sieur Aramis, votre humble serviteur, partagea le couvert avec ses fidèles compagnons Athos et Portos, deux fines lames aux estomacs bien affûtés. Point de duel, mais un menu 4 services, sabré de vins choisis, auquel nous avons juré fidélité comme à notre panache.
L’apéritif ouvre les hostilités : le rire fuse, les souvenirs d’antan s’échappent de nos cœurs comme traits et carreaux d’arbalète, et les amuse-bouches préparent l’assaut.
Premier service, entrée en lice…
Première salve ! Un Pique-Basse 2023 du Domaine Tropet comme étendard liquide, et des plats dignes d’une belle table de festin. Portos croise le fer avec une asperge verte grillée, du bœuf taillé au couteau, parmesan, pignons, jaune d’œuf « Zéro », crème truffée… une armée d’ingrédients en ordre de bataille, peut-être un peu trop nombreuse pour tenir dans la mêlée. Alors qu’Athos et moi, plus portés sur les escarmouches maritimes, nous délectons d’une raviole ouverte de petits gris, filet de sole snacké, artichaut et beurre d’herbes : voilà une attaque savamment orchestrée, toute en finesse et en vivacité.
Deuxième service… « En rang serré, mousquetaires ! »
La devise du jour : « Un pour tous, et tous… pour le foie gras ». Voici venir une pâte feuilletée de pintade et pistache, escalope de foie gras poêlée, bouillon de maïs et — Dieu me damne ! — du pop-corn ! Une alliance audacieuse mais diablement bien exécutée. Le jus d’escorte, un Ocellus 2023 de l’Abbaye de Fontfroide, mène la charge avec noblesse.
Troisième passe d’armes… Les plats, grand format !
D’un côté, cochon décliné en quatre temps : filet pur, carré, épaule braisée, lard confit… tout cela escorté d’asperge blanche, champignon farci, pomme grenaille et jus brun à l’estragon. Un vrai siège, que dis-je, une guerre d’usure — victorieuse. De l’autre, Portos exulte devant un bar rôti, paëlla de calamars et riz, crevette en tempura, jus de bouillabaisse, émulsion de chorizo. À ce stade, il ne mange plus, il conquiert. Le tout sera sabré avec un Poeira 2021, vin du Douro, solide comme un rempart gascon.
Fin de joute, l’adieu au banquet…
Le salon nous accueille pour la reddition finale : café, mignardises, et quelques alcools d’honneur pour clore cette rhapsodie gourmande.
En conclusion, Portos s’écria :
« Par la barbe de Richelieu ! Ces vénérables murailles ont plus de panache qu’un duel à l’aube sous les remparts. Chaque pierre semble avoir prêté serment au Roi, et murmure des histoires culinaires et gastronomiques que même d’Artagnan écouterait en retenant son souffle… et sa moustache ! »

