
Un dimanche soir sans resto, ce serait comme Liège sans son Perron, Bruxelles sans sa Grand-Place, Paris sans sa tour Eiffel, les Sept Mercenaires sans les mercenaires, David et Jonathan sans Jonathan. Bref, me voici, une fois de plus, embarqué par le Gourmandiseur, alias Bernard M., dans une sortie miam-miam-glou-glou. C’est au pied levé que Bernard me suggère une petite table albanaise à Huy, l’Arberia.
Laissez vos préjugés de côté à la vue de la devanture et du décor intérieur. Ici, simplicité rime avec authenticité, convivialité, sapidité et absolument pas avec frugalité. Vous allez comprendre. Les apéros choisis, l’immuable campari soda de Bernard et un apéritif kosovar pour moi (liqueur de mandarine, jus d’orange et slivovitz), arrivent des mises en bouche déjà bien généreuses (courgettes et aubergines grillées, câprons, tomates séchées, saucisson, petite sauce à base de poivrons et pain). À noter que les légumes proviennent du jardin du propriétaire et que le pain est fait maison. La fraîcheur et le goût y sont.

Venons-en aux plats. En entrée, des Feuilles de vigne et des Petchourkis (champignons farcis). Les meilleures feuilles de vigne de ma vie, jusqu’à présent. Rebelote, elles sont elles aussi issues des vignes que le chef cultive derrière le restaurant. Rien à voir avec celles que vous trouvez dans le commerce. Les petchourkis sont un plaisir original. Légèrement rissolés, ils gardent toute leur mâche et leur goût, et se marient admirablement bien avec la sauce qui les nappe. Pour les plats principaux, je me décide pour le foie de veau, tandis que Bernard prend le chou farci. À l’arrivée des plats, on sent qu’on va caler. De fait. Pourtant, tant le foie que le chou sentent bon la cuisine traditionnelle sans fioritures, généreuse en quantité et plaisante au palais. Cuisson fondante du foie, proposé avec du chou rouge et vert cru en accompagnement. Simple, efficace et réussi. Le chou farci est également un régal. J’aurais aimé que l’assaisonnement du foie soit un peu plus marqué, mais avec la fleur de sel et le poivre que j’ai ajoutés, j’ai obtenu le résultat recherché.

Et les fluides, là-dedans ? Deux bouteilles de rouge agrémenteront notre repas. Nos choix seront gagnants. Le premier, un Bourgogne Caractère de chez Pierre Gelin, un Gamay noir de 2022 dont la belle robe grenat cache un nez profond sur des notes de fruits noirs, légèrement épicé. Un vin souple en bouche, élégant et particulièrement bien équilibré. Le deuxième, un Cairanne Le Vin de Gaston 2022. Servi trop frais, il faudra attendre un peu avant qu’il ne révèle ses arômes. Nous sommes ici sur un 80 % grenache et 20 % syrah. Il se caractérise par une robe grenat – oui, encore -, un nez profond sur des notes de fruits noirs, légèrement épicé. La bouche est généreuse, élégante et particulièrement bien équilibrée avec l’élevage en fûts de chêne. Un vin fruité aux tanins bien enrobés, aux notes de fruits à l’eau de vie. Belle transition. Puisque l’eau, c’est la vie, nous terminerons par une eau de vie : le slivovitz, un spiritueux slave sec fait à partir de quetsches.
